SHEIKH KHALID BIN MAHFOUZ
1949-2009

« Agis pour ta vie comme si tu allais vivre éternellement et agis pour l'au-delà comme si tu allais mourir demain. »

Le Sheikh Khalid Bin Mahfouz s'est éteint des suites d'une insuffisance cardiaque le 16 août dernier, après avoir souffert de troubles cardiaques durant de nombreuses années. Il était né à Jeddah le 30 Jumada al-thany 1368 du calendrier Hijri (29 avril 1949), le second fils du Sheikh Salem Bin Mahfouz et de sa femme, Aisha Mohammed Kaki.

Le père du Sheikh Khalid était arrivé à la Mecque à l'âge de 6 ans en 1912, après avoir effectué le voyage à pied depuis le Yémen. Bien qu'il n'ait jamais reçu d'éducation formelle, le Sheikh Salem était renommé pour son intégrité et son don pour la finance, qui lui permirent de créer la première banque saoudienne indépendante, la National Commercial Bank ("NCB") en 1953.

Obéissant à la volonté de son père, le Sheikh Khalid démarre sa carrière au sein de NCB alors qu'il est encore étudiant. Il poursuit ses études primaires et secondaires à l'école Al Falah de Jeddah et prend l'habitude, durant ses vacances scolaires, d'accompagner son père à la banque où il travaille avec les caissiers et les responsables des prêts. Une fois ses études achevées, en 1970, le Sheikh Khalid, qui connait déjà parfaitement la banque, rejoint à plein temps la NCB et commence à s'occuper des clients de son père au niveau de Jeddah. Il s'affirme rapidement comme un banquier intelligent et vif d'esprit et fait preuve d'un talent particulier pour la finance et les placements internationaux. Après avoir appris le métier de banquier en Arabie saoudite et aux Etats Unis, il devient directeur-général adjoint de la NCB, chargé des investissements et des activités internationales, ainsi que des relations avec les correspondants bancaires.

Le Sheikh Khalid se retire de la NCB en 1992 pour se consacrer à l'affaire de la BCCI (dont il sera question plus bas), mais redevient directeur général de la NCB en 1996, une fois l'affaire de la BCCI définitivement terminée. Le Sheikh Khalid démissionne de son poste de la NCB en 1999, en raison de problèmes de santé accrus. Lui et sa famille vendent au même moment leur participation majoritaire dans la NCB au Saudi Public Investment Fund.

Le Sheikh Khalid a fortement contribué à la croissance et à la réussite de la NCB, qui est aujourd'hui la plus importante banque et le premier gestionnaire d'actifs financiers du monde arabe, avec plus de 221 milliards de SR d'actifs. Dès le milieu des années 80, le Sheikh Khalid comprend la nécessité d'investir dans l'informatique afin de permettre à la NCB de se doter de pratiques comparables à celles des meilleures banques multinationales, pavant ainsi la voie aux circuits bancaires électroniques actuels. Animé par cette même clarté de vision, il se lance dans le développement de produits bancaires islamiques afin de répondre à une demande nationale et internationale dont il a correctement anticipé l'essor. La NCB est aujourd'hui le principal prestataire de ce type de services en Arabie saoudite.

Outre ses activités bancaires, le Sheikh Khalid se lance dans divers investissements personnels de grande envergure, tant en Arabie saoudite que dans de nombreuses régions du monde. Son énergie et son esprit d'entreprise lui permettent de créer ou de développer un grand nombre d'entreprises de premier plan dans de nombreux pays, notamment dans les secteurs bancaires, de la santé, des télécommunications, de l'exploitation minière, de l'exploration pétrolière et gazière, du transport, du développement et de la gestion portuaires, de l'immobilier, des matières premières, etc.

Bien que le Sheikh Khalid ait réalisé de nombreux investissements couronnés de succès, le grand public découvre son nom à la suite d'un investissement malheureux dans la banque BCCI. Au cours du printemps et de l'été 1986, le Sheikh Khalid acquiert une participation de 20 % et des intérêts de dette substantiels dans la BCCI, qui est alors une banque internationale en plein essor fondée en 1972 au Moyen-Orient à l'aide de fonds d'investissement de la Bank of America. Quatre ans plus tard, la BCCI s'effondre, entraînant des poursuites judiciaires à l'encontre du Sheikh Khalid, lequel est à l'époque non seulement l'un des principaux responsables de la NCB, mais aussi l'un des plus importants investisseurs au monde. Le Sheikh Khalid, qui a exercé les fonctions de directeur non exécutif de la BCCI de 1986 à 1989, n'a cependant assisté qu'à très peu de réunions du conseil d'administration et n'a aucune connaissance des activités illégales de la BCCI qui émergeront plus tard. Le Sheikh Khalid vend sa participation dans la BCCI en 1988, en exerçant son droit contractuel de revendre ses actions à la banque, mais conserve ses intérêts de dette. Lors de l'effondrement de la BCCI en 1990, Sheikh Khalid et un associé sont mis en accusation dans l'Etat de New York, car la BCCI est accusée d'avoir induit en erreur les déposants et les organismes de régulation en ne divulguant pas publiquement que le Sheikh Khalid avait vendu ses actions de la BCCI. Le Sheikh Khalid, qui a perdu des centaines de millions of dollars en intérêts de dette lors de la faillite de la BCCI, conteste vigoureusement avoir eu connaissance des problèmes de la BCCI et refuse d'admettre une quelconque faute de sa part.

En 1993, la procédure pénale intentée à son encontre est abandonnée, tout comme une enquête civile menée par la Federal Reserve Bank sur l'acquisition illégale de First American Bank par la BCCI. Soucieux de régler l'ensemble des affaires en instance, le Sheikh Khalid et le second défendeur offrent et acceptent de verser quelque 225 millions de dollars US à la Federal Reserve Bank de New York, à la condition que les fonds soient essentiellement utilisés par les liquidateurs de la BCCI nommés par la cour afin de dédommager les déposants et les créanciers qui ont essuyé des pertes en raison de l'effondrement de la BCCI. Il n'y jamais eu d'aveu de culpabilité vis-à-vis de quelconques malversations et aucune des sommes versées par le Sheikh Khalid n'a jamais fait figure d'amende ou de pénalité. Cette offre de règlement remarquablement généreuse par le Sheikh Khalid, qui n'était pas liée à un quelconque risque légal plausible, a été malheureusement interprétée comme un aveu de complicité dans les malversations de la BCCI.

Le Sheikh Khalid était en fait connu de ses proches associés pour sa remarquable générosité tout au long de sa vie. Ses actes de charité ont bénéficié à d'innombrables organisations sociales, familles dans le besoin et personnes démunies. Il a personnellement financé la construction d'un nombre important de mosquées et d'hôpitaux au sein du Royaume. Il a toujours agi en toute humilité, évitant toute publicité et refusant de répondre aux questions concernant ses activités charitables.

Les tragiques événements du 11 septembre ont entraîné diverses allégations extravagantes et dénuées de fondements, selon lesquelles le Sheikh Khalid et d'autres membres en vue de la société saoudienne finançaient en fait le terrorisme à travers leurs contributions charitables. Bien que le Sheikh Khalid ait toujours été un homme très privé et d'une grande douceur, qui n'avait jamais entamé aucune action en justice devant des tribunaux occidentaux, il était déterminé à confronter et à réfuter ces fausses accusations hautement diffamatoires, en ayant recours aux tribunaux s'il le fallait, car elles s'attaquaient à des contributions charitables qui étaient au service des plus faibles et des plus démunis. Depuis le début de l'année 2003, le Sheikh Khalid et sa famille ont reçu de nombreuses excuses de la part de journalistes et d'auteurs qui avaient été induits en erreur par les allégations sensationnelles qui circulaient sur Internet. Des actions en justice se sont parfois avérées nécessaires, entraînant ainsi six poursuites pour diffamation à Londres. A chaque fois, le Sheikh Khalid a été complètement exonéré par les tribunaux anglais. Aucune preuve n'a en fait jamais été produite pour appuyer les allégations formulées à son encontre. En réfutant avec succès les informations mensongères qui avait été publiées sur lui ainsi que sur d'autres, le Sheikh Khalid a su gagner le respect et l'admiration des citoyens du monde entier, qui ont confiance dans l'équité du droit et qui comprennent le travail important mené par les œuvres de bienfaisance islamique. Le Sheikh Khalid s'est particulièrement réjoui d'avoir été exonéré par les distingués tribunaux d'Angleterre, un pays qui était devenu sa seconde patrie et où il comptait un vaste cercle d'amis et de relations d'affaires.

Outre son travail de banquier, d'investisseur et de philanthrope, le Sheikh Khalid était un compositeur et un poète accompli, connu sous le pseudonyme d'Anaser. Ses poèmes en arabe ont été interprétés par de nombreux chanteurs saoudiens et arabes. C'était également un passionné de sport, et notamment de football : il était à ce titre membre honoraire actif et supporteur du Al Ittihad, le célèbre club de football saoudien.

Il laisse derrière lui une femme et trois enfants, qui étaient à son chevet lorsqu'il s'est éteint.

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